Faire ensemble la Révolution 2024-2025
Séminaire de M2 , 2e semestre 2024-2025
Séminaire organisé par Solenn Mabo (université de Rennes, Tempora) et Pierre Serna (université Paris 1 Panthéon Sorbonne, IHRF-IHMC)
pour le cycle « Les relations femmes-hommes à l’épreuve des bouleversements révolutionnaires »
Le mercredi, de 17 h à 19 h
Salle Marc Bloch, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
17 rue de la Sorbonne, Paris 5e
(sauf séance du 14 mai, aux Archives nationales de Pierrefitte-sur-Seine)
Contact : pierre.serna@wanadoo.fr
Télécharger le programme (.pdf, 137 ko)
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Présentation du cycle
Ce séminaire est conçu pour durer quelques années afin de faire évoluer le projet, se donner un vocabulaire commun et tenter d’inviter le plus d’intervenant·e·s possible sur ce chantier en plein développement après son ouverture il y a une trentaine d’années.
Nous n’avons pas la prétention d’inventer mais souhaitons nous intégrer dans une vaste recherche en cours, poursuivre la réflexion et tenter de l’ouvrir encore, pour tester ses acquis, identifier des problèmes en suspens, esquisser de nouvelles pistes d’analyse.
L’idée de départ n’est pas de faire une histoire des femmes ou des hommes. Elle n’est pas non plus de faire une histoire du genre et de sa construction comme système, même si l’un des enjeux est bien de mettre la question des rapports de genre à l’épreuve des bouleversements révolutionnaires. Il s’agit d’abord de tenter une histoire des liens (sous toutes leurs formes) qui ont pu exister entre femmes et hommes durant la Révolution. Ces liens, nous voudrions les saisir à partir de leurs expériences quotidiennes, celles d’hommes et de femmes qui font et vivent ensemble la Révolution, qu’ils se trouvent mêlés, à côté, séparés ou face à face. Cette approche peut-elle déboucher sur une autre histoire ? Une histoire n’excluant ni la recherche d’identité sexuée, ni les zones de conflictualité, ni les formes de domination mais faisant jouer le plus possible le ET, la conjonction de coordination entre les Femmes ET les Hommes, pour essayer de retrouver des formes nouvelles ou peu explorées de mixité pacifiées, neutres ou opposées.
Cette question se pose dans un cadre chronologique précis qui est celui d’une période charnière qui irait de 1780 à 1820 pour prendre ensemble quelques générations, nées vers 1740, 1760 1780 1800 et les interroger au travers d’une question aussi simple qu’épineuse, celle des façons de vivre ensemble ou d’aspirer à le faire autrement.
Ni histoire des réseaux, ni histoire des sociabilités, l’accent mis sur les liens entre les personnes peut sembler en effet une « histoire simple ». Mais il n’est pas si évident d’évaluer dans quelle mesure la Révolution française est aussi une histoire de relations qui auraient changé. Y a-t-il eu une révolution des rapports entre hommes et femmes durant ces 40 années et comment fut-elle vécue, sentie, écrite, perçue, comprise ?
Plutôt que de penser en termes de mieux ou moins bien, progrès ou régression, ce qui engagerait une dimension polémique qui ferait perdre de vue l’objet et l’histoire vécue, nous ne renonçons pas non plus à pointer certaines dates dans leur importance et leur conséquence. Parallèlement, pour sonder les effets de la rupture révolutionnaire sur les formes et les recompositions des relations femmes-hommes, il faut encore tenter d’inscrire cette histoire dans celle des sociétés, en Europe et au-delà, traversées elles-aussi, de près ou de plus loin, par les dynamiques révolutionnaires ou leurs échos.
Tout d’abord une typologie s’impose pour mieux éclairer le terme de relations.
Elles sont saisies dans le terme le plus large qui soit : amitié, complicité, batailles politiques partagées, au sein de la famille, amour conjugal, amour extra-conjugal, séduction, conflits, relations intellectuelles, professionnelles, entre des générations différentes (fils-mère, père-fille aux différentes époques de la vie), divorce et prise de liberté des femmes dans l’espace civil à défaut d’espace civique pour elles.
Une autre typologie s’impose pour affiner la méthodologie selon les relations étudiées et les sources susceptibles de les éclairer (archives notariales, judiciaires, presse, correspondances privées, traités, théâtre et romans, littérature médicale, sciences naturelles, iconographie sous forme d’images, de caricatures, de tableau, de portraits)
Une troisième dynamique peut être posée selon que l’on ait à faire à des individus isolés ou des groupes constitués. Y a-t-il des groupes désormais mieux visibles grâce aux thèses soutenues récemment ou en cours – comme les prostituées, les ouvrières indigentes, les institutrices, les femmes contre-révolutionnaires, les épouses de députés – qui montrent de nouvelles relations, de nouvelles formes de communications, ou encore des assignations à de nouveaux rôles ?
Cela implique aussi d’envisager le cadre matériel précis de ces relations, une géopolitique sexuée des espaces comme les cafés et auberges, la rue, les marchés, l’habitation coloniale, le régiment, les lieux de culte, les salons, les comités, les clubs, les assemblées et leurs tribunes, les espaces familiers de la maison, de l’atelier, et d’autres à préciser. Une quatrième dimension est celle de l’épistémologie. Quelle langue adopter pour décrire cette mixité « rebrassée » et redynamisée par les événements révolutionnaires ?
Y a-t-il une zone de mixité nouvelle qui redéfinirait les assignations socio-politiques de chaque sexe ? Y a-t-il une invisibilité d’un espace qui pourrait être transgenre, où s’accompliraient des pratiques échappant à la binarité du genre, sous la forme d’une citoyenneté neutre et qui serait une réelle invention révolutionnaire dont peuvent rendre compte les portraits des années 1810-1820 ? Comment comprendre et approfondir les nouveaux concepts qui ont été proposés, par exemple ceux de « conjugalisme » ou de « familialisme » proposés par Anne Verjus ? Dans cette perspective comment repenser l’expression de « citoyenne sans citoyenneté », tant mobilisée depuis les recherches fondatrices de Dominique Godineau ? Comment envisager celle de virilisme ou les redéfinitions de la masculinité durant la période révolutionnaire, telles qu’elles se construisent du point de vue des mœurs mais aussi contre la perception de la dégénérescence des corps sous l’Ancien Régime et donc à partir d’une angoisse du corps masculin efféminé ?
Ce sont là quelques pistes pour aborder au ras du sol, une histoire simple et complexe à la fois, à poursuivre, pour tenter de poursuivre une histoire dynamique des relations et de ce face à face entre femmes et hommes n’excluant pas d’autres relations entre femmes et femmes et hommes et hommes.
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Programme
Mercredi 12 février 2025 | Brigitte Dionnet (université Paris 1 Panthéon-Sorbonne)
Libres et autonomes, les citoyennes ouvrières porteuses de révolution
Mercredi 19 février 2025 | Michèle Riot Sarcey (université Paris VIII Saint-Denis)
Comment réintroduire l’histoire des exclus (femmes et autres catégories minorées) de l’histoire advenue ? Une question d’historicité ou la nécessité de penser une histoire discontinue
Mercredi 5 mars 2025 | Michel Biard (université de Rouen)
Femme de Révolutionnaire (d’après les Mémoires d’Elisabeth Duplay (1773-1859), veuve Le Bas)
Mercredi 12 mars 2025 | Joanna Hope Toohey (université de Princeton)
La transformation révolutionnaire à l’épreuve : Révolution, temporalité, et les évaluations des individus dans les sociétés populaires, 1789-1795
Mercredi 19 mars 2025 | Jennifer Ngaire Heuer (université du Massachussetts)
La récompense du soldat : l’amour et la guerre à l’époque révolutionnaire et napoléonienne ?
Mercredi 26 mars 2025 | Anne Verjus (CNRS, ENS LYON)
Abolir le patriarcat . L’utopie féministe de James Henry Lawrence (1773-1840)
Mercredi 9 avril 2025 | Mathilde Chollet (associée aux université des Lyon et Le Mans)
Les histoires d’amour finissent mal, en général. Réécrire la vie de Sophie Cottin (1770-1807)
Mercredi 23 avril 2025 | Frédéric Régent (université Paris 1 Panthéon-Sorbonne)
Suzanne et Toussaint Louverture, un couple dans la tempête révolutionnaire, de Saint-Domingue à la déportation en France
Mercredi 30 avril 2025 | Jean-Loup Kastler (université Paris 1 Panthéon-Sorbonne)
La journée des tuiles du 7 juin 1788 : révolution des gantiers ou révolution des herbières ?
Mercredi 7 mai 2025 | Solenn Mabo (université de Rennes)
Citoyennes et révolutionnaires loin des villes, loin des clubs : quelles pistes de recherche ?
Mercredi 14 mai 2025
Sources et ressources des Archives nationales
Attention :
Attention : cette séance a lieu sur le site des Archives nationales,
au 59 Rue Guynemer, Pierrefitte-sur-Seine (93) -
Bibliographie
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